Il faut avoir le cœur bien accroché pour suivre les mouvements sur les taux d’intérêt ces derniers temps. Après le mouvement haussier, notamment sur les taux courts, il y a deux semaines (cf. notre dernier rendez-vous du lundi), la semaine dernière s’annonçait à haut risque entre la réunion de la Fed et celle de la BoE, d’autant plus après les sorties « hawkish » des banques centrales d’Australie et du Canada et dans le cadre du resserrement monétaire en cours dans la plupart des pays émergents. Cependant, force est de constater que les principales banques centrales (Fed, BCE et BoE) peuvent se payer le luxe d’être plus complaisantes avec l’inflation et que les marchés financiers ne semblent pas leur en tenir rigueur, ce qui n’est, par exemple, pas le cas pour les pays émergents. Les principaux banquiers centraux continuent ainsi, tant bien que mal, et avec plus ou moins de crédibilité, de marteler le discours d’une inflation transitoire comme, par exemple, Philip Lane, chef économiste de la BCE, qui a rappelé ce matin « qu'il existe de puissantes raisons de croire que l'inflation va baisser l'année prochaine » appelant ainsi à « être suffisamment patients pour ne pas réagir de manière excessive ».
La Fed, qui tenait sa réunion de politique monétaire la semaine dernière, a annoncé les détails de son tapering, finalement sans surprise puisque Jerome Powell en avait déjà annoncé les grandes lignes. Les achats d’actifs seront donc réduits de 15 milliards de dollars par mois (sur 120 milliards) dès novembre pour se terminer mi-2022. Cependant, le président de la Fed continue d’avoir comme cheval de bataille le plein-emploi, qui est encore éloigné selon lui. Cette posture permet à la Fed de temporiser sur une future hausse des taux, et ce, malgré des chiffres de l’emploi pour octobre encore au-dessus des attentes, en espérant toujours une décrue de l’inflation l’année prochaine pour desserrer l’étau sur l’institution américaine.
La BoE, qui s’exprimait en fin de semaine, a pris les marchés à contre-pied en ne précipitant pas son resserrement monétaire, entraînant ainsi une brutale chute des taux courts anglais de plus de 20 bps pour le 2 ans. Andrew Bailey, le gouverneur de la Banque d’Angleterre, a rappelé que, malgré le pic d’inflation en cours, un resserrement trop rapide provoquerait une chute de l’inflation sous l’objectif de long terme en plus de l’impact négatif sur la croissance. Dilemme ici magnifiquement résumé et qui pèse sur les banquiers centraux des pays développés, notamment européens. Si une hausse des taux directeurs de la BoE reste toujours probable sur le premier trimestre 2022, les principales banques centrales ne veulent pas, en général, se précipiter dans le resserrement monétaire, au risque de contredire les anticipations des investisseurs.
Ces discours plus « dovish » qu’attendus, couplés à un faisceau de bonnes nouvelles (publications d’entreprises supérieures aux attentes, résultats encourageants pour la pilule antivirale de Pfizer, vote du plan d’infrastructure aux Etats-Unis, ...), ont poussé les marchés actions à des niveaux records. Une partie de la hausse serait néanmoins alimentée par des flux de particuliers via des options, ce qui entretiendrait le phénomène de hausse. Cela nous incite à rester vigilants.
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