Comme à leur habitude, les États-Unis rejouent périodiquement le psychodrame du shutdown quand ce n’est pas celui du plafond de la dette. Cette fois-ci, le Congrès a évité de justesse le blocage des administrations fédérales en adoptant une mesure d’urgence permettant de continuer leur financement pendant 45 jours. L’aide à l’Ukraine en fait pour l’heure les frais même si ce volet doit faire l’objet d’un projet de loi distinct. Rendez-vous donc mi-novembre pour la suite de l’épisode. Concrètement, cette solution de dernière minute ne règle pas le problème de fond, républicains et démocrates devant toujours se mettre d’accord sur le budget à venir de l’Etat. La donne s’annonce d’autant plus ardue que Kevin McCarthy, le président de la Chambre des représentants, est sur un siège éjectable. En effet, élu de justesse à la Chambre, à très courte majorité républicaine, à la faveur du vote des élus trumpistes, c’est lui qui est à l’initiative de cette mesure d’urgence grâce au soutien des démocrates alors que la frange la plus à droite des républicains y était farouchement opposée.
Aussi schizophrène que cela puisse paraître, cette nouvelle ne semble pas constituer un réel soulagement pour les marchés. En effet, alors qu’un shutdown aurait eu un impact négatif sur la croissance américaine (de l’ordre de 0.2 point de PIB par semaine selon les analystes de Goldman Sachs) à même de relâcher un peu la pression sur les taux, cette mesure d’urgence permet de maintenir les perspectives de croissance de court terme et conforte donc l’idée d’une nouvelle hausse des taux de la Fed. La réintégration constante de l’idée d’une banque centrale américaine qui maintiendrait ses taux durablement plus élevés et la résilience de l’économie ont donc envoyé les taux américains à de nouveaux plus hauts. Ce mouvement, couplé à l’appréciation du dollar, a impacté négativement la quasi-totalité des classes d’actifs qui finissent toutes dans le rouge sur la semaine écoulée. Pourtant, les données macroéconomiques ont continué de militer pour un ralentissement de l’économie américaine. Ainsi, la confiance du consommateur, calculée par le Conference Board, pour septembre s’est inscrite en baisse pour le deuxième mois d’affilée. Par ailleurs, les données d’inflation PCE, références pour la Fed, confirment la baisse des tensions avec, par exemple, une inflation PCE core qui passe pour la première fois sous les 4% depuis septembre 2021, même si le chemin vers la cible des 2% paraît encore loin.
Nous continuons de penser que l’économie américaine marquera davantage le pas que ce qu’anticipe actuellement le consensus. Si la résilience des données macroéconomiques est exceptionnelle au regard de l’augmentation des taux, les surprises à la hausse vont aller en s’amenuisant avec, par ailleurs, de nombreux points d’attention qui pourraient accélérer la baisse de l’activité : grève dans le secteur automobile, reprise du paiement des prêts étudiants, validation du budget… Autant d’éléments qui devraient, selon nous, permettre à la Fed de maintenir ses taux inchangés.
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