Déjà accaparés par l’apparition du nouveau variant Omicron, les marchés financiers ont également dû jongler la semaine dernière avec les déclarations de Jerome Powell lors de son audition devant la commission bancaire du Sénat, dans le cadre du suivi des plans de relance. Alors que le contexte sanitaire est encore incertain, a minima le temps de mieux cerner les conséquences de ce nouveau variant mais également le temps de tester l’efficacité des vaccins existants, le président de la Fed a adopté un ton résolument plus « hawkish » auquel les investisseurs étaient jusque-là assez peu habitués. Exit donc le terme « temporaire » pour qualifier l’inflation, pourtant martelé depuis maintenant de longs mois en dépit des doutes du marché. Jerome Powell ne manque ainsi pas de nous rappeler la célèbre chanson de Jacques Dutronc : « L’opportuniste ». Force est de constater que le Président de la Fed a retourné sa veste... toujours du bon côté (?)... Pour la Fed, les pressions inflationnistes devraient maintenant se maintenir une bonne partie de l’année prochaine, Jerome Powell reconnaissant que les énormes problèmes d’approvisionnement lui avaient échappé... et que les risques d’une inflation persistante avaient désormais augmenté. Le rythme du tapering devrait donc être accéléré afin de terminer les achats d’actifs au cours du premier semestre 2022 pour permettre une remontée des taux directeurs plus rapidement si nécessaire. Le marché anticipe désormais avec une probabilité de presque 100% une hausse de taux dès juillet 2022 alors qu’elle n’était que de 50% en début de semaine dernière. Cette hausse restera néanmoins conditionnée à l’amélioration continue du marché de l’emploi. Sur ce dernier point, les chiffres publiés vendredi pour le mois de novembre ont, une nouvelle fois, surpris avec des créations d’emplois largement sous les attentes à 210k sur le mois, contre 550k attendues, mais un taux de chômage en baisse de 0.4% à 4.2% et un taux de participation en très légère augmentation à 61.8%. Le taux de participation reste néanmoins encore 1.5% en-dessous de ses niveaux pré-crise, ce qui contribue aux perturbations en cours sur le marché du travail (pression à la hausse sur les salaires, manque de main-d’œuvre dans certains secteurs). Parmi les principales explications, la Fed de Kansas City avance qu’une part de la pénurie de salariés viendrait de personnes partis en pré-retraite et qui ont été dissuadées par la crise de retrouver une activité. L’autre point avancé par S&P serait la part croissante des femmes dans la population active qui seraient encore bloquées dans le retour à l’emploi par la peur du Covid et la garde des enfants à cause des écoles encore fermées.
Au-delà du changement sur le fond opéré dans le discours de Jerome Powell, mais qui s’inscrit finalement dans la continuité des déclarations de plusieurs membres de la Fed depuis maintenant plus d’un mois, le timing peut interpeller alors que le risque sanitaire n’est pas totalement écartée même si les nouvelles sur la semaine ont été plutôt rassurantes, les symptômes d’Omicron étant considérés jusqu’à présent comme modérés malgré sa contagiosité. Jerome Powell semble donc, pour une fois, vouloir avoir un coup d’avance en se laissant la possibilité d’augmenter les taux plus rapidement si le contexte économique devait le permettre ou si l’inflation venait réellement à déraper.
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