L’actualité principale de la semaine dernière est évidemment l’annonce, par le laboratoire pharmaceutique américain Pfizer, associé à la biotech allemande BioNTech, d’une efficacité à 90% de son vaccin contre la Covid-19, lors de résultats préliminaires de phase 3. Si cette annonce constitue indubitablement une bonne nouvelle, d’autant plus que le taux annoncé est largement supérieur aux attentes, il est important de noter qu’il ne s’agit pour l’heure que d’un communiqué de presse des deux entreprises sans publication de données scientifiques. Ces résultats devront être confirmés lors de la poursuite de l’étude et, surtout, passer le test de sécurité qui sera rendu public d’ici la fin du mois. Ce vaccin, développé sur la nouvelle technologie de l’ARN messager, présente l’avantage de pouvoir être produit très facilement en très grande quantité (pratique quand il faut vacciner près de 8 milliards d’individus) contrairement aux autres vaccins qui, comme celui de la grippe par exemple, nécessitent de cultiver préalablement en laboratoire un agent pathogène. L’un des principaux défis sera la mise en œuvre de son déploiement, notamment dans certains pays, car le vaccin nécessite une conservation à -70 degrés. A noter également que cette technologie constituerait une première sur l’homme.
Si les défis à court terme restent bien présents, notamment au regard de l’accélération de l’épidémie aux Etats-Unis et du creux de croissance attendu au quatrième trimestre voire au premier trimestre de l’année prochaine, cette bonne nouvelle, qui devrait être suivie par l’annonce d’autres laboratoires (Moderna, dont le vaccin se base sur la même technique, vient d’ailleurs de publier ce matin des résultats positifs pour ses essais de phase 3 avec un taux d’efficacité de près de 95%), permet aux investisseurs d’ancrer leurs anticipations et de renforcer le scénario d’une reprise économique pour l’année prochaine. Conséquemment, les marchés, acheteurs d’optimisme, ont fortement rebondi sur la semaine avec un mouvement violent de rotation sectorielle au profit des actions dites « value » (environ 7% de différence de performance entre le MSCI EU Growth et le MSCI EU Value sur la semaine). Alors, enfin l’heure de la grande rotation ? Il faut dire que le vrai-faux départ a déjà été donné plusieurs fois. Si la crise a accentué le différentiel de performance entre les deux thématiques (« growth » versus « value ») et s’il est normal d’avoir un effet rattrapage sur les positions ayant le plus souffert à court terme, il ne faut pas oublier que la sous-performance de la « value » ne date pas d’hier. Pas sûr donc que la salve d’annonces de vaccins soit de nature à changer fondamentalement la donne. En effet, si 2021 devrait être marquée par un rebond significatif de la croissance, nous pouvons penser que la crise de la Covid-19 a été un élément destructeur de croissance potentielle (déjà en baisse structurelle depuis plusieurs années) et que les années futures seront encore marquées par une croissance molle dans un contexte de taux bas, plus favorable aux actions « growth ».