La planche à billets n’est, semble-t-il, pas uniquement l’apanage des banques centrales ! Ainsi, après seulement quelques mois de mandat et un premier plan de relance pour soutenir l’économie de 1 900 milliards de dollars, Joe Biden a détaillé, la semaine dernière, la première partie de son plan « Build Back Better » visant à moderniser les Etats-Unis. Baptisé « American Jobs Plan », ce programme d’investissement de près de 2 300 milliards sur 10 ans cible essentiellement les infrastructures avec l’objectif affiché de créer des « millions d’emplois » mais également de rester compétitif face à la Chine. Le plan prévoit notamment 620 milliards de dollars pour les infrastructures de transports avec la modernisation de plus de 32 000 kilomètres de routes et la réparation de plus de 10 000 ponts à travers le pays. Ce programme d’investissement se veut plus large en visant également la transition numérique (haut débit), écologique (véhicules à énergie verte) et climatique (infrastructures plus résistantes aux évolutions climatiques) ainsi que des financements dans la recherche et développement, le secteur manufacturier et dans les infrastructures sociales. Si le déficit d’infrastructures aux Etats-Unis fait plutôt consensus, avec, par exemple, une baisse des investissements de 40% depuis les années 60 dans ce domaine, la bataille au Congrès s’annonce une nouvelle fois difficile : pas assez pour l’aile gauche du parti (« needs to be way bigger »), un « cheval de Troie [permettant] de dépenser plus et d’augmenter les impôts » pour les Républicains. Pourtant, même Donald Trump, en son temps, avait soulevé le problème et proposé des plans d’investissement tout aussi massifs.
Contrairement à son premier plan, et alors que les Etats-Unis font face, comme beaucoup de pays, au plus important déficit budgétaire depuis l’après-guerre, celui-ci sera en partie financé par des hausses d’impôts. Conformément à la promesse électorale de Joe Biden, l’impôt sur les sociétés devrait être relevé de 7 points à 28%, ce qui devrait rapporter 850 milliards sur 10 ans selon le CRFB (Committee for a Responsible Federal Budget). D’autres hausses d’impôts sont également à prévoir comme, par exemple, l’augmentation du GILTI (Global Intangible Low-Tax Income) qui vise à limiter l’optimisation fiscale en taxant les profits réalisés en dehors des Etats-Unis. Hasard du calendrier, Yanet Yellen, la secrétaire américaine au Trésor, souhaite proposer au G20 un impôt minimum pour les sociétés afin d’en finir avec une « course vers le bas de la fiscalité » (et éviter un exode des entreprises américaines en cas de hausses d’impôts ?).
Alors que les marchés actions américains sont déjà partagés entre l’impact de la hausse des taux et celui de la progression des bénéfices grâce à une reprise économique dynamique, la question devrait également se poser entre l’impact du relèvement de la fiscalité et celui des effets bénéfiques de ce nouveau plan sur la croissance américaine. Ni Pythie ni Sibylle ne répondront à ces questions à notre place…
Même si la rotation factorielle globale observée depuis novembre 2020 (du style growth vers le style value) semble s’atténuer depuis une semaine, la pièce n’étant pas encore retombée, nous maintenons le positionnement blend de nos portefeuilles.