Après le changement de doctrine de la Fed annoncé par Jerome Powell lors du symposium de Jackson Hole fin août, la réunion du FOMC de la semaine dernière était l’occasion pour les membres de l’institution de préciser les outils à leur disposition. Si la banque centrale a, comme attendu, laissé sa politique monétaire inchangée, elle a en revanche profondément modifié sa communication (forward guidance) afin d’affirmer plus clairement son changement de doctrine et ainsi tenter d’être plus crédible aux yeux des marchés dans la réalisation de ses objectifs.
La Fed ne communiquera donc plus à l’avenir sur des objectifs quantitatifs à atteindre mais portera un jugement qualitatif sur un ensemble de données macroéconomiques pour la détermination de sa politique monétaire. Sur le marché du travail, la cible de taux de chômage est ainsi remplacée par un objectif de « maximum d’emploi » qui regroupe un ensemble d’indicateurs sur le marché du travail (taux de participation, écart géographique ou ethnique entre les populations, …). Les publications des rapports sur l’emploi vont donc perdre de leur consistance car il sera plus difficile d’en tirer une conclusion sur les actions à venir des membres du FOMC. Idem sur l’inflation, où l’objectif de 2% à moyen long terme permet de dépasser cette cible pour compenser les périodes d’inflation plus faible sans que cela n’entraîne un relèvement des taux directeurs.
n enlevant ces points de repères chiffrés aux investisseurs, la banque centrale se libère ainsi de la publication des indicateurs macroéconomiques à court terme. Les anticipations des agents économiques sur la politique monétaire de la Fed ne tiennent donc quasiment plus qu’à sa forward guidance. Le message est donc clair : faites nous confiance pour atteindre nos objectifs ! La crédibilité de la banque centrale se veut donc renforcée quand elle annonce maintenir ses taux directeurs à zéro jusqu’à 2023.
Cette réunion était aussi l’occasion pour la Fed de revoir ses prévisions de croissance. Si les membres du FOMC ont été agréablement surpris par la vigueur du rebond au cours des derniers mois, cette tendance semble clairement ralentir. Les ventes au détail, moteur de la croissance américaine, sont ainsi ressorties sous les attentes et en baisse par rapport au mois précédent. Par ailleurs, certains indicateurs hautes fréquences montrent une hausse des fermetures définitives d’entreprises ce qui pourrait peser à terme sur le marché de l’emploi. Le choc attendu est donc moins violent que prévu mais avec une reprise plus longue (la prévision de croissance pour 2020 a été revue à la hausse de -6.5% à -3.7% mais celles de 2021 et 2022 sont revues à la baisse). Si aucun nouvel outil n’a été annoncé pour soutenir la croissance, la Fed continue de maintenir la pression sur le gouvernement pour plus de relance budgétaire alors que le Congrès peine à se mettre d’accord, à un mois et demi des élections…