Alors que les marchés financiers semblent toujours plus ou moins empreints d’optimisme, les déclarations de Jerome Powell, lors de ses deux jours d’auditions devant le Congrès, le sont beaucoup moins. Le président de la FED s’est en effet, une nouvelle fois, montré très prudent sur le scénario d’une reprise rapide de l’économie américaine précisant que le pire était sûrement à venir en termes de faillites et de licenciements, notamment dans les secteurs les plus affectés par la crise et malgré le lancement du programme de prêts aux PME baptisé « Main Street Loan Facilities », tout un symbole qui nous rappelle l’adage que nous répétons depuis le début de cette crise : « Wall Street n’est pas Main Street ».
Jerome Powell a par ailleurs rappelé que la prévision de croissance américaine pour cette année (attendue à -6.5% par la FED) s’entendait sans seconde vague. Sur ce point, la situation sanitaire américaine est à suivre avec prudence. En effet, contrairement à l’Europe, la « phase 1 » n’est même pas encore terminée et plusieurs Etats, qui ont commencé leur déconfinement beaucoup trop tôt, continuent de voir une augmentation du nombre de cas, obligeant par exemple Apple à fermer ses magasins en Floride, en Arizona, en Caroline du Nord et en Caroline du Sud. Le risque d’un reconfinement n’est donc pas à exclure et retarderait d’autant la reprise de l’économie, sans parler de l’impact sur les marchés financiers.
Enfin, lors de son allocution, le président de la FED a également rappelé la nécessité de maintenir la relance budgétaire en complément d’une politique monétaire accommodante. Comme c’est le cas en Europe, la banque centrale est essentiellement là pour faciliter l’endettement par le maintien de taux durablement bas mais le transfert direct à l’économie réelle passe par de la dépense budgétaire. De ce côté-là, le plan de relance massif voté par le Congrès en début de crise pour soutenir les ménages américains (chèque direct du Trésor, hausse de l’indemnisation chômage, …) a permis de relancer la consommation. Les ventes au détail pour le mois de mai ont d’ailleurs fortement rebondi (+17.7% contre -16.4% le mois précédent soit -6.1% en glissement annuel). Mais ces mesures sont transitoires (les mesures sur le chômage doivent par exemple prendre fin en juillet et le Trésor ne signera pas des chèques tous les mois) et un nouveau plan devra sûrement être validé sous peine de voir la consommation repartir à la baisse. Par ailleurs, et preuve que la situation n’est pas encore totalement revenue à la normale, la production industrielle marque toujours le pas avec un rebond de seulement 1.4% sur le mois de mai (après -11.2% le mois précédent). En glissement annuel, la production industrielle est toujours en baisse de -15.3%. Le robinet de liquidités devra donc continuer de rester ouvert encore quelques temps sous peine de voir l’économie retomber aussitôt.