La BCE s’y est quasi engagée : elle baissera les taux directeurs lors de sa réunion de politique monétaire de la semaine prochaine. Toute autre décision serait catastrophique pour les marchés qui anticipent de façon unanime ce mouvement. Mais quid d’après ? Les récentes sorties des différents membres de l’institution européenne appellent à la prudence et une nouvelle baisse des taux en juillet semble peu probable. Joachim Nagel, le président de la Bundesbank, considéré comme un membre hawkish de la BCE, renvoie par exemple au moins jusqu’à septembre pour une deuxième baisse. Essayons de regarder le verre à moitié plein : dans le langage retenu des banquiers centraux, un des membres les plus faucons de la BCE se risque déjà à parler du timing d’une deuxième baisse alors que la première n’est pas encore formellement actée … Si la prudence reste de mise sur notre vieux continent c’est que le retour vers une inflation à 2% n’est pas encore totalement acquis, quoiqu’en bonne voie.
D’une part, contrairement aux États-Unis, la dynamique de croissance de la zone est attendue en accélération sur l’année même si l’ordre de grandeur y est bien différent (on parle d’une croissance attendue pour cette année en zone euro de 0.7% contre 2.4% de l’autre côté de l’Atlantique). L’amélioration de la conjoncture en zone euro transparait dans la publication des indicateurs d’activité pour le mois de mai. Le PMI composite pour la zone est ainsi ressorti au-dessus des attentes à 52.3 (52 attendu et 51.7 le mois précédent), au plus haut depuis un an. La confiance des entreprises revient même sur des niveaux d’il y a plus de deux ans. Cette croissance reste néanmoins toujours tirée par les services. Le secteur manufacturier reste, en effet, toujours en phase de contraction depuis maintenant juillet 2022 même s’il convient de noter que le chiffre de mai est le plus élevé en 15 mois. Cette bonne dynamique est également présente en Allemagne qui relève la tête notamment grâce à la demande domestique.
D’autre part, la croissance des salaires, un des points d’attention clés de la BCE, est repartie à la hausse sur le premier trimestre de cette année. Alors qu’un ralentissement était attendu, l’indice estimé par la BCE sur l’évolution des salaires négociés par convention collective est ressorti à 4.7% en rythme annualisé contre 4.5% en décembre. Ce chiffre a surpris les investisseurs car les dernières déclarations à ce sujet se voulaient plutôt rassurantes. Un des éléments avancés pour expliquer ce rebond viendrait du bonus anti-inflation versé aux fonctionnaires allemands sur le premier trimestre, le poids important du pays biaisant les données alors que la tendance reste baissière dans les autres pays de la zone. De plus, cet indice ne tient naturellement pas compte de l’entièreté du marché du travail en zone euro et la BCE essaiera sûrement de se rassurer en regardant d’autres indicateurs (notamment Indeed, cf. graphique de la semaine).
Comme l’a rappelé Philip Lane, l’économiste en chef de la BCE, la politique monétaire devrait rester restrictive jusqu’en 2025. Mais avec des taux directeurs à 4% pour un taux neutre estimé à 2,5%, la « marge est significative » selon François Villeroy de Galhau.
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