Les derniers chiffres d’inflation américains, publiés la semaine dernière pour le mois de janvier, sont ressortis au-dessus des attentes et sont venus doucher les espoirs de ceux qui anticipaient une progression annuelle de l’indice des prix inférieure à 3%, soit les niveaux (déjà) de mars 2021. Ces chiffres ont fait ressurgir le débat sur la difficulté du « dernier kilomètre » (i.e. la dernière phase de baisse de l’inflation vers la cible des 2%). Si ces derniers semblent donner raison à cette théorie, la dynamique baissière de l’inflation étant clairement moins prononcée sur les derniers mois, ce narratif, très présent dans le discours des banques centrales, apparaît néanmoins contesté par certaines études économiques et certains banquiers centraux eux-mêmes. C’est par exemple le cas de François Villeroy de Galhau, Gouverneur de la Banque de France, qui ne considère pas que « la dernière ligne droite soit, par nature, plus difficile. La désinflation peut y être un peu plus lente mais ceci ne signifie pas un "dernier kilomètre" plus aléatoire ou plus ardu ». Ainsi, après une première phase de baisse très rapide de l’inflation, plus rapide que lors des précédents cycles, due notamment à des effets de base importants, le « dernier kilomètre » ne serait pas plus compliqué mais simplement plus long. Patience est donc mère de toutes les vertus. Malheureusement, les marchés financiers ne sont pas patients … ou vertueux (ou les deux).
Dans le détail, les prix à la consommation américains ont connu une progression mensuelle pour les indices global et core de respectivement +0.3% et +0.4% soit des variations en rythme annualisé de +3.1% (contre +3.4% en décembre) et +3.9% (inchangée sur le mois). Si les prix dans l’alimentaire restent dynamiques, notamment sur l’alimentation hors domicile (+0.5% sur le mois et +5.1% sur 1 an), l’inflation reste globalement concentrée sur le « noyau dur » et plus particulièrement les loyers qui représentent quasiment deux tiers de l’indice. La progression des prix y reste importante (plus de 6% en annualisée) et, même si le point d’inflexion est acté depuis maintenant mars 2023, le décalage avec la baisse des prix de l’immobilier est clairement plus long qu’escompté. Cet écart est d’autant plus troublant que les indices « en temps réel » sur les loyers sont plutôt à l’équilibre voire négatifs en variation mensuelle. Par ailleurs, les loyers ne doivent pas totalement cacher les autres foyers inflationnistes, l’évolution des prix dans les services (hors loyers) reste, en effet, encore importante à +3.6% et en accélération sur le mois. Néanmoins, les indices Trimmed-mean de la Fed de Cleveland, qui excluent les variations les plus hautes et les plus basses font toujours état d’une baisse des pressions inflationnistes.
Comme nous l’avons mentionné dans notre dernier rendez-vous du lundi, pour le moment, seuls les taux d'intérêt intègrent moins de baisse de taux directeurs pour cette année. Ainsi, les marchés actions restent, à ce stade, insensibles au contexte sur les taux et le marché du crédit est, quant à lui, tout simplement atone avec des spreads qui établissent de nouveaux plus bas depuis presque 2 ans et le début de la guerre en Ukraine.
« Pourvu que ça dure ! » comme le disait un regretté humoriste breton.
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