Où s’arrêtera donc l’économie américaine ? La résilience de la première économie mondiale, qui plus est dans un contexte de taux restrictif, force en effet l’admiration. Et ce n’est pas notre bonne vieille Europe qui dira le contraire. La publication du rapport sur l’emploi américain pour le mois de mars, publié vendredi dernier, a, une nouvelle fois, surpris les marchés financiers en ressortant largement au-dessus des attentes. On en viendrait presque à se questionner sur la pertinence des prévisions économiques : attendues à 214k, les créations d’emplois s’affichent finalement à 303k soit 40% au-dessus des estimations. C’est bien simple, sur les 74 économistes du panel, pas un n’avait prévu un chiffre aussi élevé. On comprend donc mieux la notion de « data-dependence » des banques centrales…
Dans le détail, les créations d’emplois restent donc extrêmement solides avec un rythme nettement supérieur à la moyenne des 3 et 12 derniers mois. C’est d’autant plus significatif que les mois précédents ont également été revus à la hausse. Les créations restent concentrées sur un nombre limité de secteurs (santé, loisirs et hôtellerie et les services publics, ce dernier secteur étant toujours en phase de rattrapage post-covid et profitant de la hausse des dépenses fédérales). Même l’enquête auprès des ménages, qui renvoyait lors des derniers mois une vision plus mesurée du marché du travail, a fortement rebondi. Alors que ces créations seraient essentiellement dues à des emplois à mi-temps, elles seraient finalement concentrées chez les jeunes travailleurs et les personnes de plus de 55 ans. Dans ce contexte, le taux de chômage a baissé de 0.1% en mars pour s’établir à 3.8% alors que le taux de participation s’affiche en hausse. Pas grand-chose de négatif donc à signaler sur le marché du travail en mars. Même si la progression des salaires continue de se normaliser (cf. graphique de la semaine) et est amenée à se poursuivre (hausse de l’immigration légale, baisse de la rotation de la main-d’œuvre,…), ce rapport sur l’emploi a donné du grain à moudre aux membres les plus faucons du FOMC qui y voient ainsi l’occasion de maintenir une politique monétaire restrictive plus longtemps. L’évocation par Neel Kashkari, le président de la Fed de Minneapolis, « de renoncer à toute baisse de taux cette année » si nécessaire n’a naturellement pas été bien accueillie par le marché. Les données d’inflation qui seront publiées mercredi seront donc cruciales pour essayer d’y voir plus clair dans le calendrier de baisse des taux directeurs de la Fed.
Et la BCE dans tout ça ? Au vu des derniers chiffres, l’inflation semble de moins en moins être un problème en zone euro. La publication de mars fait ainsi état d’une nouvelle baisse, sous les attentes, de l’inflation globale et sous-jacente. L’inflation dans les services, qui se maintient aux alentours de 4%, peut permettre à la BCE de temporiser encore un peu (cela sera sûrement mis en avant lors de la réunion de politique monétaire de cette semaine). Mais pour combien de temps ? Christine Lagarde n’aura bientôt plus le luxe de laisser Jerome Powell ouvrir le bal.
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