"Tout se passe comme si...". Cette phrase communément utilisée dans le milieu scientifique pour se rassurer sur le bon déroulé d'une expérience pourrait aussi trouver à s'appliquer en cette fin d'année lorsque l'on observe la tournure prise par les évènements. En l’absence de catalyseurs significatifs sur la semaine écoulée, aussi bien macro que micro, les marchés financiers ont temporisé en attendant celle qui s’ouvre et qui s’annonce cruciale pour prendre le pouls de cette fin d’année, avec notamment les réunions de la Fed, de la BCE et de la BoE et la publication du chiffre d’inflation américain pour le mois de novembre.
Mettons-nous alors à la recherche des trois petits pivots qui ont fondé, selon nous, le récent regain d’appétit pour le risque (observé depuis mi-octobre).
Du côté des banques centrales, les signes d’inflexion en faveur d’une pause dans le resserrement monétaire se multiplient. La Banque du Canada (BoC), malgré une nouvelle hausse de ses taux directeurs de 50 bps (pour les porter à 4.25%), a, par exemple, retiré de son communiqué final toute affirmation relative à une prochaine hausse de taux. Si la BoC a de l’avance sur son homologue nord-américaine dans le resserrement monétaire, tous les regards sont évidement tournés vers la Fed avec le tant attendu « pivot dovish ». Les chiffres d’inflation pour le mois de novembre, qui seront publiés demain, donneront sûrement le ton de la réunion du FOMC. Si l’inflation globale est attendue en baisse de 0.4% en rythme annuel (de 7.7% à 7.3%), le combat n’est pas pour autant déjà gagné. En effet, l’ISM Services est sorti bien au-delà des attentes en novembre, preuve de la dynamique dans les services, dont la composante dans l’inflation ne cesse de progresser (avec une contribution d’environ 50% au sein de l’inflation globale). Dans le même temps, les prix à la production ont eux aussi surpris, avec des baisses plus faibles qu’anticipé. Cette semaine pourrait conforter l’inflexion constatée dans la politique monétaire de la Fed. Une chose est sûre cependant, le degré actuel de cette inflexion ne suffit pas encore pour parler de véritable « pivot dovish ».
Le deuxième pivot, beaucoup plus rapide cette fois, concerne la politique zéro-covid en Chine. Afin d’atteindre un objectif de croissance de 5% l’année prochaine, le bureau politique du Parti communiste a annoncé « optimiser les mesures de prévention et de contrôle ». L’assouplissement des restrictions depuis deux semaines est spectaculaire et « en phase avec les temps qui changent » selon les officiels chinois. On est plus proche de la girouette que du pivot et d’aucuns s’inquiètent déjà du risque de saturation du système sanitaire chinois. Cela constitue néanmoins un catalyseur positif pour les marchés.
Enfin, sur le conflit russo-ukrainien, on observe les germes d’un pivot avec des tentatives de dialogue de la part de la Russie. L'armée russe arrivera probablement, mi-2023, à court d'armement balistique sophistiqué. Les livraisons de leurs quelques alliés ne suffiront pas face au flux continu d'armement déversé par l'OTAN à l'Ukraine. A date, les ukrainiens ont récupéré plus de la moitié de ce qui avait été envahi par l'armée russe depuis février et cette dernière se trouve contrainte à puiser dans des stocks de chars qui rouillent depuis 40 ans dans les champs. Ce pivot militaire a pour corollaire un pivot dans l’opinion russe (cf. graphique de la semaine).
La réalité et la pérennité de ces trois petits pivots résisteront-elles, comme les trois petits cochons, face au grand méchant loup de la récession prévue en 2023 ?
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