En attendant la Fed cette semaine, la BCE tenait jeudi dernier sa réunion de politique monétaire, particulièrement scrutée par les investisseurs qui attendaient de (nouvelles) mesures de soutien après la rapide hausse des taux depuis le début de l’année.
Les marges de manœuvre de la BCE étant, on le sait, assez limitées, tout du moins beaucoup plus que son homologue américaine, le conseil des gouverneurs a décidé de jouer sur la flexibilité du PEPP (programme de rachat d’actifs d’urgence mis en place pendant la crise) pour ramener le calme sur les taux de la zone euro, en augmentant le montant mensuel des achats dans le cadre de l’enveloppe initialement fixée. Si cette décision est assurément accommodante, le discours et les outils de la BCE n’ont finalement fondamentalement pas changé : dans le cadre de son objectif de stabilité des prix (i.e. de l’inflation), la banque centrale veille au maintien de conditions de financement très favorables. Sur le premier point, c’est peu dire que le cadre est large. En effet, si les prévisions d’inflation ont sensiblement été revues à la hausse pour cette année (1.5% contre 1% en décembre), les prévisions pour 2023 sont restées inchangées à 1.4%, bien loin de l’objectif des 2%... signe d’une hausse transitoire de l’inflation pour les économistes de la banque centrale. Sur le deuxième point, la BCE a donc considéré la récente hausse des taux comme trop rapide et pouvant mettre à mal les conditions de financement des pays de la zone euro et ainsi freiner la reprise économique. La flexibilité du PEPP va donc lui permettre d’intensifier ses achats dans les prochains mois tout en précisant, une nouvelle fois, que l’enveloppe pourrait être ajustée à la hausse ou à la baisse en fonction de l’évolution du contexte macroéconomique. Les débats auraient également porté sur l’impact pour la zone euro du nouveau plan de relance américain. Si l’Union européenne devrait indirectement profiter de l’aide aux ménages américains et du rebond à attendre de la consommation, certains membres ont indiqué que ce nouveau plan était de nature à faire pression à la hausse sur les taux américains et donc sur les taux de la zone euro par ricochet. En marge de la réunion, une source aurait d’ailleurs prononcé cette phrase pleine d’ironie et qui résume bien la dynamique entre les deux zones : « Joe Biden vient d'arriver, le projet de loi est déjà passé et le chèque sera dans le courrier la semaine prochaine. Regardez-nous dans l'intervalle. Nous parlons depuis un an et toujours rien ne sera versé avant peut-être octobre ».
La Fed prendra le relais cette semaine et sera également attendue sur la hausse des taux dans un contexte économique totalement différent avec une dynamique de croissance beaucoup plus forte. Les chiffres d’inflation américains publiés la semaine dernière ont permis de calmer un peu la hausse notamment grâce à un chiffre « core » légèrement en baisse et sous les attentes. Mais les taux américains ne pourront pas rester indéfiniment déconnectés de la croissance américaine, à moins que la Fed augmente sensiblement ses achats d’actifs.